Le pouvoir des rapports. La Cour des comptes, du jugement des comptes à l’évaluation des politiques publiques (années 1950 – années 2010). Contribution à une histoire des grands corps de l’État
La soutenance aura lieu le lundi 21 septembre 2020 à 14 heures au centre Panthéon de l’université Paris-1 Panthéon-Sorbonne (entrée par le 12, place du Panthéon), en salle 1.
Le jury sera composé de :
- Philippe BEZES – Directeur de recherche au CNRS, Sciences Po, CEE (Examinateur)
- Daniel P. CARPENTER – Allie S. Freed Professor of Government, Harvard University (Examinateur)
- Florence DESCAMPS – Maîtresse de conférences en histoire, HDR, EPHE, Histara (Rapporteure)
- Jean-Michel EYMERI-DOUZANS – Professeur des Universités en science politique, Sciences Po Toulouse, LaSSP (Rapporteur)
- Bastien FRANÇOIS – Professeur des Universités en science politique, Université Paris 1 Panthéon- Sorbonne, CESSP (Président du jury)
- Brigitte GAÏTI – Professeure des Universités en science politique, Université Paris 1 Panthéon- Sorbonne, CESSP (Directrice de thèse)
Résumé
Entre l’après-guerre et le début du XXIe siècle, la Cour des comptes, grand corps de l’État dont les membres ont pour la plupart compté parmi les meilleurs élèves de l’ENA, a connu une trajectoire singulière : autrefois cantonnée à une tâche technique et juridique de vérification de la régularité des comptes publics, elle a progressivement étendu ses missions vers des tâches réputées plus politiques comme le contrôle de la gestion, l’évaluation des politiques publiques ou encore l’analyse macro des finances publiques. De surcroît, ce changement ne s’est pas fait dans la discrétion : la Cour est devenue dans le même temps une institution fortement médiatisée. En d’autres termes, les magistrats ont construit de nouveaux publics, de nouvelles alliances, ont renouvelé leur profession et leur rôle et ont déplacé la « frontière » entre le politique et l’administratif (Eymeri-Douzans, 2003).
Au rebours des approches traditionnelles sur les grands corps de l’État, qui tendent à mettre l’accent sur les circulations des membres hors de l’institution (vers d’autres administrations, en cabinet ministériel, dans des entreprises ou à des postes d’élus), l’hypothèse développée est que les membres du corps ont modelé leur travail quotidien dans les murs, c’est-à-dire l’écriture de rapports, pour renforcer et améliorer leur position au sommet de l’État. La thèse interroge ainsi dans un premier temps les évolutions des formes de contrôle exercées par les magistrats des comptes, en les contextualisant dans les transformations de l’État. Elle examine ensuite la manière dont les acteurs ont fait reconnaître leur expertise par des publics variés (gouvernement, parlementaires, journalistes, groupes d’intérêt…) et ont construit une nouvelle image organisationnelle. Elle entre enfin dans la boîte noire de la production et de la réception des rapports, pour comprendre comment une institution peut être durablement reconnue comme « lieu neutre ».
L’approche retenue utilise les outils de la sociologie des institutions (Lagroye, Offerlé, 2010) et les travaux sur la réputation organisationnelle (Carpenter, 2010). Elle repose sur l’exploitation de matériaux divers : entretiens, archives écrites et orales, observations, analyse de la presse et de rapports publics.