Centre européen de sociologie et de science politique

Vichy face aux instituteurs. Réformer les politiques scolaires en contexte autoritaire

Juliette Fontaine

Editions Dalloz, collection Nouvelle bibliothèque de thèses, 2021, 600 pages

Sous Vichy, une réforme de l’institution scolaire en rupture avec l’École républicaine est affichée comme prioritaire par les gouvernants du nouveau régime et des décisions sont prises en ce sens : les principes de la citoyenneté affirmés dans les lois Jules Ferry et les acquis démocratiques de l’entre-deux-guerres sont contestés. Comment et à quelles conditions le Gouvernement de Vichy a-t-il réformé le secteur de l’éducation alors que le corps enseignant sur lequel reposent les politiques scolaires sous la Troisième République lui est majoritairement hostile ? C’est la question à laquelle cette thèse propose de répondre, dans la continuité des travaux qui critiquent la mise à distance de la dimension politique de l’action publique et qui interrogent les tournants de l’action publique notamment dans des contextes autoritaire et d’alternance politique. Pour ce faire, la thèse retrace la fabrique des politiques scolaires sous Vichy, de leur émergence à leur mise en œuvre, en prêtant attention aux configurations historiques et polico-administratives particulières dans lesquelles elles s’inscrivent. En nous appuyant principalement sur l’analyse de revues professionnelles et militantes, d’archives nationales et départementales, ainsi que de biographies et de mémoires d’instituteurs, nous montrons d’une part que les changements impulsés par Vichy sont préparés sous la Troisième République et trouvent leur fondement dans des alliances nouées entre de futurs dirigeants du régime et une branche conservatrice et minoritaire du groupe enseignant ; nous montrons d’autre part que même si le nouveau régime se donne pour priorité le renouvellement du corps enseignant, les pratiques professionnelles et les habitus des instituteurs sur le terrain entravent les politiques décidées au sommet de l’État français. Au final, cette thèse contribue plus largement à la réflexion sur les capacités réformatrices et les limites du volontarisme politique.


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