Dans le cadre du prochain Congrès de l’AFSP du 5 au 7 juillet 2022, Mickaël Durand et Camille Masclet organisent une section thématique intitulée « Famille et socialisation politique : nouveaux regards sur un objet classique ».
Les propositions de communication de 3000 signes maximum doivent parvenir avant le 2 novembre à camille.masclet chez cnrs.fr et mickael.durand chez ined.fr.
Appel à communications de la ST 36 : « Famille et socialisation politique : nouveaux regards sur un objet classique »
Cette section thématique propose de revisiter un questionnement classique de la science politique : celui de la famille comme instance de socialisation politique. À partir d’une conception élargie de la socialisation politique (Maurer, 2000 ; Duchesne et al., 2003 ; Boughaba et al., 2018), elle invite à réexaminer la manière dont l’univers familial contribue à façonner le rapport des individus à la politique institutionnelle mais aussi leur rapport politique au monde social. Elle vise en outre à faire dialoguer le champ de la socialisation politique avec une sociologie de la famille attentive à ses transformations contemporaines (Réguer-Petit, 2016 ; Haegel, 2020). Deux axes de réflexion sont proposés pour interroger à nouveaux frais cet objet d’études.
Axe 1 : Transmissions et conflictualisation des appartenances sociales en famille
L’analyse de la socialisation politique familiale s’est majoritairement concentrée sur la transmission des opinions et des valeurs, des préférences partisanes et idéologiques (Hooghe et Boonen, 2015 ; Jennings, Stoker et Bowers, 2009a ; Percheron, Muxel et Mayer, 1993) et, plus récemment, du militantisme (Pagis, 2014 ; Gonzalez, 2020). En science politique, les recherches ont en revanche moins portées sur les transmissions qui ne relèvent pas de la politique au sens strict. Quelques auteures se sont intéressées à l’identification nationale (Throssell, 2015 ; Duchesne, Ferry, 2020) ou aux héritages féministes (Masclet, 2015), mais les appartenances de genre, de race, de classe, ou religieuses par exemple, qui peuvent être inscrites dans l’histoire familiale et transmises entre générations, ont peu fait l’objet d’analyse en termes de socialisation politique. Derrière ces identifications, il s’agit de saisir l’intériorisation des rapports de domination et la fabrication d’un rapport plus ou moins politisé à ces derniers et aux normes afférentes. Comment se transmettent et se façonnent, dans la sphère familiale, des rapports politisés au monde social ? Les conditions sont-elles similaires à celles favorisant les transmissions politiques plus institutionnelles entre générations mises au jour par la littérature (visibilité et homogénéité des préférences politiques parentales, fort degré de politisation, etc.) ? Comment ces autres transmissions familiales nourrissent-elles le rapport des individus au champ politique ?
Axe 2 : Les agent·e·s et les temps pluriels de la socialisation politique familiale
Face à la focalisation de la littérature sur les transmissions parents-enfants et sur la socialisation politique primaire, ce deuxième axe a pour objectif d’éclairer d’autres agent·e·s et périodes socialisatrices. Alors que « en pratique, ce n’est pas la famille qui socialise l’enfant mais des individus déterminés au sein de ce groupe » (Court et Henri-Panabière, 2012, p. 5), on s’intéressera ici à des membres de la famille plus rarement analysés. Les frères et sœurs, les grands-parents, les beaux-parents ou encore d’autres membres de l’entourage familial élargi peuvent-ils constituer des autrui significatifs sur le plan politique ? Comment leur influence socialisatrice s’articule-t-elle avec celle des parents, généralement considérés comme les principaux agent·e·s à l’intérieur du cercle familial ? Qu’en est-il du couple qui, en dépit de travaux récents (Muxel, 2008, 2015 ; Baloge et Grégory, 2018), demeure une instance de socialisation politique sous-investiguée ? S’intéresser à la diversité des agents socialisateurs ou au couple soulève également la question des processus de socialisation politique familiale à l’âge adulte (la fratrie adulte, la belle-famille, etc.). Dans une perspective de socialisation (politique) continue (Darmon, 2016), ou du modèle de « life-long openness » (Jennings et Niemi, 1978), l’individu est socialisé au politique tout au long de sa vie, et la famille peut continuer à avoir un rôle dans ce processus. Des évènements biographiques familiaux à l’âge adulte (un divorce, un coming-out, etc.) ou des configurations familiales spécifiques (monoparentalité, homoparentalité) peuvent par exemple transformer politiquement l’individu. Ainsi, les communications qui interrogent la famille au sens large comme instance de socialisation politique secondaire et qui réfléchissent à l’emboîtement des socialisations politiques familiales au fil de la vie sont tout particulièrement attendues.
Les propositions de communication doivent être fondées empiriquement. Bien que la focale soit sur la famille, elles seront attentives à l’articulation des socialisations familiales étudiées avec les autres instances de socialisation, ainsi qu’aux effets sur ces processus des différents rapports sociaux et de leur imbrication. Les réflexions méthodologiques sur les manières d’appréhender les processus de socialisation politique en vigueur au sein des familles sont également les bienvenues.